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De Savants en Suiveurs

De Savants en Suiveurs

« L’ignorance mène à la peur, la peur mène à la haine et la haine conduit à la violence »

Averroès (1126-1198), Médecin, juriste et philosophe arabe espagnol.

Comme chaque fois, les théories très réductrices des philosophes, psychologue et autres artisans du bien-penser, ne mènent pas très loin, voire nulle part.

Ainsi, il suffirait de faire peur (Bouhhh) aux ignorants (nous le sommes tous un peu à différents niveaux) pour attiser, semble-t-il, la haine (a priori d’autres) qui sommeille en nous et sombrer dans la violence.

Quel tableau !

Pour Alejandro Jodorowsky, artiste franco-chilien né en 1929, inspiré d’Averroès : « La peur se réfugie dans l’ignorance et l’ignorance produit la haine ». Il en arrive à la conclusion : « Qu’est-ce qui produit la peur ? Le manque de connaissance de soi ». Si l’ignorant savait ce qu’il ignore, il serait sûrement beaucoup plus savant !

Nous, qui ne sommes pas des ignorants, avons bien compris qu’ils expliquent comment certains divisent pour mieux régner.

Ce qu’ils n’ont pas compris par contre, c’est que ces méthodes fondées sur la peur ont toujours existé et perdureront encore longtemps parce que c’est un processus naturel incontournable. Penser pouvoir y changer quoi que ce soit relève de l’impossible. D’autant que la façon dont tous, philosophe ou pas, s’y prennent pour les dénoncer est tout aussi alarmiste que ce qu’ils dénoncent.

Qui n’a pas peur en regardant ce croquis ?

Le premier commet une erreur en considérant que la haine sommeille en chacun et qu’il suffit de la réveiller pour qu’elle se transforme en violence. Cela dépend de la nature de l’être, de son for intérieur. Il y a une barrière naturelle que peu franchissent.

Le deuxième rajoute une erreur sur l’erreur. L’absence d’explications n’aidera personne à en savoir plus sur la façon de mieux se connaître.

C’est la ronde des pantins ! Celui qui n’a pas compris explique à celui qui ne sait rien et de savants en suiveurs chacun y va de son refrain. La comptine est entraînante, mais pas harmonieuse. Ce n’est pas parce que beaucoup se plaisent à la chanter que cela en fait une vérité pour autant. C’est foncièrement faux !

La peur, relève de la croyance donc du contexte. Comme l’équilibre, elle se matérialise (se prend ou se défait) dès que l’on en prend conscience. Tant qu’une émotion ne se manifeste pas, cette prise de conscience n’a pas lieu. Nous ne pouvons donc pas avoir peur de ce que nous ignorons, mais de ce que nous risquons de perdre. La peur agit sur la crainte en se nourrissant de ses faiblesses. Perdre la vie, un amour, un bien…

N’ayant pas d’emprise sur l’ignorance, elle reste sans effet tant que le contexte ne lui est pas favorable, c’est à dire familier ou perceptible.

Ainsi, voir une silhouette dans une ruelle la nuit fait peur, mais pas un monstre à un enfant qui ne sait pas ce que c’est. Pas plus qu’un pétard ne fera sursauter un sourd.

L’ignorance relève de l’intellect. Ce n’est pas une émotion, mais un état. À l’inverse de la connaissance, l’ignorance n’est pas volontaire. Nous naissons ignorants. Sa carence ne suscite pas la haine, mais tout naturellement, la curiosité, maillon faible de l’ignorant et terrain fertile de tout prédateur. (« Tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute ». J. De La Fontaine 1621-1695 ; le corbeau et le renard).

La haine relève de l’émotion. Elle n’a pas sa place dans cette pseudo équation qui n’est en fait qu’une déduction hâtive. Simplement parce qu‘elle se construit avec le temps par des circonstances répétitives qui relèvent de la contrariété. La haine est toujours ciblée, sans objectif, elle ne peut ni se construire ni aboutir. Ce n’est donc pas la faiblesse des ignorants, mais l’arme des puissants.

Concrètement, à quoi cela nous mène-t-il de savoir cela ?

Au discernement ! Le super pouvoir de l’être humain pour agir ou s’abstenir !

À quoi sert le discernement ? À éviter de se prendre les pieds dans le tapis au moment où l’on s’y attend le moins. Cela offre la particularité d’éviter de devoir assumer des conséquences regrettables ou d’avoir à recommencer.

Axiologie – l’émotion

Comme les apparences sont volontairement trompeuses, l’axiologie raisonne par rapport à la chaîne événementielle dont dépend l’émotion et non sur des constats qui donnent à coup sûr une vision erronée de la réalité. Les anciennes civilisations nommaient cela les réalités stables.

Ce sont des modules (principes) de référence spécifiques aux émotions. Ils sont permanents, vérifiables et applicables par tous, partout, quelle que soit l’époque, surtout la nôtre.

La progression s’établit comme suit :

Une influence, la Cause, suscite une Émotion qui entraîne une Conséquence, l’Action.

Là en l’occurrence, le terme qui devrait être utilisé n’est pas – peur – qui est une émotion, mais – menace – qui est la cause d’une émotion passive ou active.

1 — La personne concernée ne comprend pas la menace, réelle ou supposée, elle va s’abstenir d’agir. Soit parce que la peur l’en empêche, soit parce que la raison est douteuse.

La progression est passive : menace, réflexion, inaction.

2 — La personne concernée trouve un intérêt à agir parce que la menace touche l’une de ses cordes sensibles, matérielles ou personnelles.

La progression est active : menace, conviction, action.

Ce sont les ignorants justement qui font pencher la balance. Ce sont a priori de bonnes personnes, animées de bons sentiments. L’affectif est chez eux en position dominante.

Sauf que c’est loin d’être inoffensif et beaucoup plus insidieux qu’il n’y paraît. Être ainsi ne sert pas les bonnes décisions, mais la soumission.

C’est bien là tout le problème, car ce sont des êtres de nature fragiles, craintifs, qui redoutent de perdre ce à qui ou à quoi ils tiennent le plus.

La vraie fonction de l’émotion se situe à cet instant en réveillant en eux leur vraie nature. Ils auront alors à prendre les bonnes décisions, au risque d’en payer un prix parfois très fort.

Certains seront alors prêts à « croire » la menace, visible ou verbale, et feront facilement confiance à ceux dont ils devraient se méfier.

C’est de cette façon que s’opèrent l’aliénation et le conditionnement.

Dans le cas précis de croyances profondes, religieuses, politiques et même parentales, qui bien trop souvent se fondent, alors oui, les convictions, poussées et entretenues, peuvent conduire à la haine, avec les risques que cela suppose. Seulement dans le cas d’un conditionnement !

Tout le processus repose sur l’émotion.

Notre intellect est notre bien le plus précieux, mais aussi le plus convoité.

Il y a les vampires affectifs, les boulimiques du pouvoir et tous ceux qui décèlent en nous le potentiel qui manque à leur richesse, matérielle ou intellectuelle. Ceux, également, qui veulent peupler leurs rangs et autres profiteurs du genre humain. Enfin, ceux qui enchaînent sans intention de nuire parce que les convictions ancrées par les précédents laissent une empreinte qui peut mettre du temps à s’effacer.

Tous savent que pour atteindre leurs objectifs, ils devront d’abord convaincre, voire imposer.

La porte d’accès pour parvenir à leurs fins est l’émotion. C’est le maillon faible, notre pire ennemie, la plus prompte à nous trahir à la moindre occasion pour qui cède à ses caprices.

La clé sera la corde sensible sur laquelle ils pourront jouer. S’ils la trouvent, ils sauront que leur proie n’est pas émotionnellement forte pour résister.

Elle endossera alors inévitablement le costume de victime, puisque son travail consistait précisément à surmonter ses faiblesses et qu’en cédant au discours, elle ne l’aura pas fait.

Denis Notari

2 comments so far

Denis NotariPublié le8:46 - Nov 23, 2018

Loin de moi l’idée de faire des reproches à quiconque se laisserait embarquer par ces discours. C’était pour moi l’opportunité d’expliquer que nous sommes tous à la merci de ces philosophes qui peuvent, eux tout particulièrement, prendre le temps de réfléchir avant de parler. Justement parce que leur parole fait référence.
Je reconnais que ce dessin est trompeur pour qui n’a pas les outils pour en percevoir le côté insidieux. L’occasion pour moi d’expliquer un peu l’axiologie plus en détail.

LouizPublié le2:57 - Nov 23, 2018

Très éclairant texte traitement de prétendues idées naissant spontanément d’images ou de schémas rencontrés par hasard mais mises en circulation avec intention.

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